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Saturation du marché: explosion des prix pour nouvelles stations de traitement d'eaux usées

Questions parlementaires Développement durable, nature et environnement Gusty Graas

Quel est l'impact de cette hausse de prix sur les projets en cours de réalisation? Quelles possibilités pour les communes respectivement les syndicats pour ne pas devoir payer beaucoup plus pour leur installation? Le député du DP Gusty Graas s'est renseigné auprès de la ministre compétente.

Question

Monsieur le Président,

Par la présente, j’ai l’honneur de vous informer que, conformément à l’article 83 de notre Règlement interne, je souhaite poser la question parlementaire suivante à Madame la Ministre de l’Environnement, du Climat et du Développement durable :

« Comme le soulèvent certains membres du Syvicol et du Siden dans un article de presse récent, les circonstances actuelles seraient très défavorables pour atteindre les objectifs en termes de traitement des eaux urbaines résiduaires tels que fixés par le cadre européen.

En effet, de plus de la baisse des dotations financières de l’État aux communes, suite à la pandémie actuelle, une saturation du marché des constructeurs de stations d’épuration laisserait exploser les prix de celles-ci, entraînant des problèmes importants de financement pour les communes.

D’après le même article, le ministère de l’Environnement aurait réagi à cette situation par une circulaire selon laquelle les communes et syndicats pourraient réintroduire leurs demandes de subsides afin de les adapter aux prix du marché plus élevés.

Au vu de ce qui précède j’aimerais poser les questions suivantes à Madame la Ministre de l’Environnement, du Climat et du Développement durable :

- Combien de projets de traitement d’eaux usées sont actuellement en phase de planification ou en phase de construction ?

- Madame la Ministre peut-elle chiffrer les surcoûts à prévoir pour les projets concernés par rapport aux montants prévus initialement ?

- Est-ce que des réunions ont déjà eu lieu entre les représentants des communes et des syndicats d’un côté et du ministère de l’Environnement et de l’Administration de la gestion de l’eau de l’autre côté afin de discuter de cette problématique et de trouver une solution autre que de simplement payer des prix plus élevés ?

- Madame la Ministre peut-elle confirmer que jusqu’à présent les appels d’offres publics en matière de traitement d’eaux usées se sont largement concentrés sur les marchés allemand et suisse ?

- Madame la Ministre estime-t-elle qu’en élargissant les appels d’offres à d’autres marchés, tels que le marché français, belge ou néerlandais, les coûts pour les projets en question pourraient être réduits ?

- Dans l’affirmative, est-il prévu de sensibiliser les communes et syndicats davantage à cette option et de les assister dans cette entreprise, le cas échéant ?

- Madame la Ministre envisage-t-elle de donner aux communes et syndicats la possibilité de décaler leurs projets en attendant un apaisement du marché ? Dans la négative, quelles en seraient les raisons ? »

Veuillez croire, Monsieur le Président, en l’expression de ma très haute considération.

Gusty GRAAS
Député

Réponse de la Ministre de l'Environnement, du Climat et du Développement durable à la question parlementaire n°3251 du 4 décembre 2020 de l’honorable député Monsieur Gusty Graas concernant le « Traitement d'eaux usées »

  1. Combien de projets de traitement d’eaux usées sont actuellement en phase de planification ou en phase de construction ?

On compte actuellement 48 stations d’épuration biologiques en planification et 35 stations d’épurations en phase de soumission ou de construction.

  1. Madame la Ministre peut-elle chiffrer les surcoûts à prévoir pour les projets concernés par rapport aux montants prévus initialement ?

Etant donné qu’une attribution d’un marché est la décision par laquelle le pouvoir adjudicateur choisit l’offre économiquement la plus avantageuse, il serait difficile, voire impossible de prévoir l’évolution des marchés dans le futur et de chiffrer les surcoûts éventuels.

  1. Est-ce que des réunions ont déjà eu lieu entre les représentants des communes et des syndicats d’un côté et du ministère de l’Environnement et de l’Administration de la gestion de l’eau de l’autre côté afin de discuter de cette problématique et de trouver une solution autre que de simplement payer des prix plus élevés ?

Les syndicats ont rapporté leurs doléances aussi bien auprès du Ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable qu’auprès de l’Administration de la gestion de l’eau par divers échanges de courriers et courriels. Le sujet a également été discuté lors de réunions portant sur différents projets concernés par la hausse des prix et lors d’entrevues avec les syndicats intercommunaux. La faisabilité de différentes variantes et d’alternatives a été analysée.

  1. Madame la Ministre peut-elle confirmer que jusqu’à présent les appels d’offres publics en matière de traitement d’eaux usées se sont largement concentrés sur les marchés allemand et suisse ?

Rappelons tout d’abord que les communes et syndicats de communes agissent comme maître d’ouvrage et sont responsables de la forme et du contenu de leurs cahiers de charges. Le choix de la langue de soumission est dès lors réservé au pouvoir adjudicataire, donc aux communes et syndicats de communes en ce qui concerne les projets de traitement des eaux usées. Bien que le choix d’une langue puisse en effet avoir une influence sur l’origine des candidats répondant à l’appel d’offres, il est à noter que les procédures de soumission des travaux se font dans les cadres légaux et réglementaires qui se doivent. D’ailleurs, tout projet d’une envergure financière supérieure à 5.548.000 EUR hTVA doit faire l’objet d’une procédure de soumission européenne. Néanmoins, il est toujours possible de prendre recours à une soumission européenne afin de diversifier les offres soumises, même si le seuil mentionné n’est pas atteint.

  1. Madame la Ministre estime-t-elle qu’en élargissant les appels d’offres à d’autres marchés, tels que le marché français, belge ou néerlandais, les coûts pour les projets en question pourraient être réduits ?

Le choix de soumissionner en langue allemande, française ou autre est réservé au pouvoir adjudicataire. Il est à rappeler que les soumissions européennes sont par définition accessibles à toute entreprise ressortissante de l’UE. Rédiger les appels d’offres en plusieurs langues pourrait néanmoins potentiellement élargir le recrutement de candidats potentiels.

  1. Dans l’affirmative, est-il prévu de sensibiliser les communes et syndicats davantage à cette option et de les assister dans cette entreprise, le cas échéant ?

Le Ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable ne peut que rappeler que la procédure des marchés publics est à respecter pour tous les projets. L’Etat fixe également les critères pour la qualité des eaux traitées à réaliser par la nouvelle station. Cependant, il n’appartient pas à l’Etat de se prononcer sur les détails des cahiers de charges et des modalités de soumission qui sont sous la responsabilité des communes et syndicats intercommunaux.

  1. Madame la Ministre envisage-t-elle de donner aux communes et syndicats la possibilité de décaler leurs projets en attendant un apaisement du marché ? Dans la négative, quelles en seraient les raisons ?

En novembre 2013, la commission européenne a pénalisé le Luxembourg pour ses manquements dans la mise en œuvre de la directive européenne 91/271/CEE relative au traitement des eaux urbaines résiduaires, ce qui a généré des coûts de 6,2 millions d’euros à charge du budget de l’Etat luxembourgeois.

Lors de l’établissement du premier plan de gestion des districts hydrographiques du Rhin et de la Meuse (parties luxembourgeoises), tel qu’imposé par la directive cadre sur l’eau (2000/60/CE), en 2009 seulement 7 % des masses d’eau de surface étaient dans un bon état écologique. Lors de l’établissement du deuxième plan de gestion en 2015 seulement 2% des masses d’eaux étaient classés en bon état écologique. Partant de l’interdiction de détérioration de l’état des masses d’eau, la réalisation des mesures retenues par le programme de mesures, y inclues celles concernant les projets d’assainissement, est une obligation absolue pour permettre au Luxembourg de se rapprocher du « bon état de toutes les masses d’eau en 2027 ».

Il va sans dire qu’un non-respect des délais imposés par les deux directives précitées dans le domaine de l’eau et de l’assainissement directive risquerait d’engendrer, le cas échéant, une procédure d’infraction pour le Luxembourg. Partant, un retard supplémentaire dans la réalisation des projets, dont tant la nécessité et les obligations y afférentes découlant des textes communautaires précités étaient connues, depuis de nombreuses années, n’est pas envisageable et un décalage des projets ne pourrait être accepté.

Il convient également de rappeler que les projets d’infrastructures d’eaux usées sont censés être financés à travers la tarification de l’eau, qui conformément à l’article 12 de la loi modifiée du 19 décembre 2008 relative à l’eau doit prendre en compte les coûts réels des services liés à l'utilisation de l'eau, y compris les coûts pour l'environnement en tenant compte des principes de l'utilisateur-payeur et du pollueur-payeur. C’est pour cette raison que les consommateurs paient une redevance assainissement, établie par règlement communal. Conformément à l’article 14 de la loi précitée, la redevance couvre l'ensemble des charges liées à la conception, la construction, l'exploitation, l'entretien et la maintenance des infrastructures nécessaires à l'assainissement des eaux usées, y compris les amortissements de ces infrastructures.

 


Gusty Graas