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Porteur vu geféierleche Krankheeten: Ginn et Sandmécken och zu Lëtzebuerg?

Questions parlementaires Santé et soins Développement durable, nature et environnement Gusty Graas

Duerch de Klimawandel verbreede sech exotesch Déieren ëmmer méi an nërdlech Géigenden, wéi z.B. d'Sandméck. Allerdéngs kann dëst Insekt, dat ursprénglech aus den Trope kënnt, fir de Mënsch ganz geféierlech Krankheeten iwwerdroen. Den DP-Deputéierte Gusty Graas huet bei den zoustännege Ministeschen nogefrot, ob et zu Lëtzebuerg scho Fäll gouf, bei deene Leit duerch sou en Insekt mat enger Tropekrankheet infizéiert goufen.

Question

Monsieur le Président,

Par la présente, j’ai l’honneur de vous informer que, conformément à l’article 83 de notre Règlement interne, je souhaite poser la question parlementaire suivante à Madame la Ministre de la Santé et à Madame la Ministre de l’Environnement, du Climat et du Développement durable :

« Suite au changement climatique, les phlébotomes, originaires des tropiques, se répandent toujours plus vers le Nord, de façon à ce que ces insectes sont observés depuis certaines années également dans nos latitudes, notamment en Allemagne et en Belgique.

À noter que les phlébotomes sont porteurs de maladies exotiques, comme par exemple la leishmaniose qui peut causer de sévères dommages aux organes vitaux.

Dans ce contexte j’aimerais poser les questions suivantes à Madame la Ministre de la Santé et à Madame la Ministre de l’Environnement, du Climat et du Développement durable :

- Est-ce que des phlébotomes ont déjà été détectés sur le territoire luxembourgeois ?

- Dans l’affirmative, combien de cas d’une transmission de la leishmaniose par phlébotome ont été recensés au Luxembourg jusqu’à présent ?

- Est-ce que l’apparition d’autres insectes exotiques, potentiellement porteurs de maladies tropiques, a été constatée au Luxembourg au fil des dernières années ?

- Madame la Ministre de la Santé est-elle d’avis que ces insectes représentent un risque pour la santé publique qui pourrait s’aggraver dans les prochaines années ?

- Quelles mesures de précaution pourraient être prises à cet égard par les autorités publiques ?

- Madame la Ministre estime-t-elle qu’il serait opportun de sensibiliser davantage la population par rapport au risque lié à la propagation de ces insectes ? »

Veuillez croire, Monsieur le Président, en l’expression de ma très haute considération.

 

Gusty GRAAS

Député

 

Réponse commune de Madame la Ministre de la Santé, de Madame la Ministre de l’Environnement, du Climat et du Développement durable et de Madame la Ministre de la Culture à la question parlementaire n°2656 du 11 août 2020 de Monsieur le Député Gusty Graas concernant les "Insectes porteurs de maladies exotiques"

 

A ce jour, aucune observation de phlébotomes n’a été documentée au Luxembourg. Selon l’European Centre for Disease Control and Prevention (ECDC), deux espèces de phlébotomes sont présentes dans la Grande Région, à savoir Phlebotomus perniciosus et Phlebotomus mascittii (https://www.ecdc.europa.eu/en/disease-vectors/surveillance-and-disease-data/phlebotomine-maps). Puisque le vecteur n’existe pas dans notre pays, aucun cas de transmission locale de leishmaniose n’a été documenté.

Comme la plupart des pays européens, des insectes exotiques potentiellement vecteurs de maladies e.a. tropicales font leur apparition au Luxembourg et parfois s'y implantent et y deviennent invasives. Leur arrivée est essentiellement en raison des échanges commerciaux intercontinentaux et du trafic autoroutier, aérien et ferroviaire.

Il faudra notamment citer ici les moustiques (Culicidae) exotiques (https://mosquitoes.lu). En coopération avec la direction de la Santé et le ministère de l'Environnement, du Climat et du Développement durable (MECDD), le Musée national d'histoire naturelle (MNHNL) réalise le projet de recherche MosquitoLUX (2019-2021) visant à compiler et à compléter les connaissances sur les moustiques au Luxembourg. Dans un contexte de changement climatique et environnemental, ce premier atlas des moustiques devrait permettre de dresser un inventaire de la faune des Culicidae, en termes de biodiversité d'abord, mais aussi en termes de santé publique et de risques liés aux vecteurs. Ce dernier nécessite non seulement la collecte de données de présence ou absence, mais aussi d'abondance et de saisonnalité selon les différents environnements. Cet inventaire devrait également permettre de détecter les espèces exotiques envahissantes introduites et les changements dans les zones de distribution des espèces indigènes. En plus particulier, les moustiques suivants retiennent notre intérêt :

 

Aedes japonicus (Moustique-tigre japonais)

L'espèce de moustique envahissante Aedes japonicus (Theobald, 1901) a été signalée pour la première fois au Luxembourg le 4 juillet 2018 à Stolzembourg, dans la vallée de l'Our, à la frontière allemande. Au cours de trois missions de terrain consécutives en 2018, 106 sites ont été inspectés, dont 91 au Luxembourg, 12 en Allemagne, 2 en Belgique et 1 en France. Aedes japonicus a été détecté sur 16 sites, la zone colonisée étant estimée à au moins 550 km2, situés à l'Est du Grand-Duché, du milieu de la vallée de l'Our au Nord à Ernster au Sud, et jusqu'à Kautenbach et Ettelbruck à l'Ouest. En considérant une vitesse de colonisation de 10-20 km / an, l'espèce pourrait coloniser l'ensemble du territoire du Grand-Duché d'ici la fin de l'année 2020. Même si l'espèce n'est pas considérée comme un vecteur important d'agents pathogènes dans son aire de répartition d'origine, on s'inquiète des menaces qu'elle pourrait faire peser sur la santé publique ainsi que sur la santé animale en tant que vecteur potentiel du virus du Nil occidental et d'autres types de virus d'encéphalite (Source: Schaffner, F. & C. Ries, 2019. First evidence and distribution of the invasive alien mosquito Aedes japonicus (Theobald, 1901) in Luxembourg. Bull. Soc. Nat. luxemb. 121: 169-183.)

 

Aedes albopictus (Moustique-tigre asiatique)

Aedes albopictus est présent dans tous les pays voisins du Luxembourg, sa station la plus proche de notre pays étant une aire d'autoroute près d'Arlon. Nous nous attendons à ce que l'espèce arrive prochainement au Luxembourg.

Dans le cadre d'un projet coordonné au niveau européen par l'action COST AIM (https://www.aedescost.eu/) auquel participe le Luxembourg, le MNHNL a installé une surveillance sur 2 aires d'autoroute au Luxembourg: l’aire de Berchem et l’aire de Capellen, dans les deux cas du côté du trafic en direction nord, car nous nous attendons à ce que le moustique-tigre asiatique entre dans le pays par le sud ou l'est. Cette surveillance consiste en 5 pièges à oeufs (ovitraps) relevés tous les 15 jours jusqu'à fin octobre. Cette surveillance permettra de gagner en expérience en vue d'une extension à moyen terme de cette surveillance à tous les points d'entrée potentiels majeurs du Luxembourg (Hub de bus internationaux à Luxembourg-ville, CFL multimodal, grandes gares, aéroport, aires d'autoroute) sous la coordination de la direction de la Santé.

 

Autres espèces de moustiques

A côté de ces espèces exotiques, plusieurs espèces autochtones peuvent servir de vecteur dans la transmission de maladies, comme p.ex. Culex pipiens (le moustique le plus répandu au Luxembourg), Culex modestus, Aedes vexans ou Anopheles claviger.

D'autre part, plusieurs espèces exotiques sont en route en Europe et parviendront à moyen ou long terme au Luxembourg : p.ex. Aedes aegypti, Aedes atropalpus, Aedes koreicus.

Outre les moustiques, d’autres insectes envahisseurs peuvent constituer des risques de santé, notamment les tiques (ordre : Ixodida), et plus particulier :

 

Hyalomma marginatum

Cette tique est très répandue dans la région méditerranéenne (originaire d'Asie) et tend à se propager vers le nord au XXIe siècle. Elle est un vecteur de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo. L'espèce a probablement survécu aux derniers hivers en Allemagne. Depuis lors, les découvertes se multiplient. Une autre espèce, Hyalomma rufipes (originaire d’Afrique) est également présente en Allemagne et dans le sud de la France, mais n'a pas encore été détectée au Luxembourg.

Actuellement (août 2020), Hyalomma a été observé à trois reprises au Luxembourg : en 2018 à Dudelange (H. marginatum), en 2020 à Beaufort et Aspelt (H. marginatum et Hyalomma sp.). Les spécimens n'ont pas été analysés pour détecter des agents pathogènes.

 

Dermacentor reticulatus

Elle est vectrice de plusieurs maladies zoonotiques graves dont la maladie de Lyme (en pleine expansion dans le monde), rickettsioses, fièvre hémorragique d'Omsk ou encéphalite à tiques et d'autres maladies vectorielles, pouvant infester plus de 60 hôtes sauvages et domestiques différents connus (pour les trois stades de développement). Considérée comme très résistante (par exemple très résistante au froid et capable de survivre plusieurs mois sous l'eau), cette tique est considérée comme posant des risques éco-épidémiologiques et de santé vétérinaire et de santé publique particuliers pour l'Homme. L'espèce est connue depuis longtemps dans le sud de l'Europe, mais elle est encore nouvelle au Luxembourg. Dermacentor se retrouve principalement dans le sud du Luxembourg. Les agents pathogènes peuvent être transmis d'une espèce de tique indigène (par exemple Ixodes ricinus) à une espèce immigrée - et vice versa. Dans les travaux de Reye et al (2011), la prévalence d'I. ricinus au Luxembourg a été étudiée. (source https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/20228110/ )

 

Le risque pour la santé publique de ces insectes dépend de deux conditions qui doivent exister simultanément :

1. la présence des vecteurs (espèces) : plusieurs vecteurs sont déjà présents et d'autres sont en route en Europe.

2. la présence d'une maladie pouvant être transmise par les vecteurs : pour le moment, ces maladies sont ramenées de voyages à l'étranger. Si, dans le temps, il s'agissait surtout de maladies ramenées de régions tropicales, depuis quelques temps, certaines maladies se sont implantées dans le bassin méditerranéen et sont en expansion (p.ex. Virus du Nil occidental, Dengue, Chikungunya). Ces maladies sont occasionnellement ramenées par des touristes luxembourgeois ou de passage au Luxembourg et pourraient être transmises par les vecteurs présents, quoique le risque peut être actuellement considéré comme minime. On peut cependant s'attendre à un aggravement du risque dans les prochaines années.

Les mesures de précaution à mettre en place consistent essentiellement en un système de surveillance et une sensibilisation de la population au risque éventuel.

En ce qui concerne les moustiques, nous disposons depuis 2018 d'un dépliant en 5 langues afin de sensibiliser la population : https://mosquitoes.lu/dealing-with-mosquitoes/ (élaboré par le MNHNL, la direction de la Santé et le MECDD)


Gusty Graas